Brazzaville : en marge du Colloque international sur le Royaume Kongo

LA GALERIE DES ARTS DU BASSIN DU CONGO DEVOILE SES TRESORS AU DIRECTEUR GENERAL DU CICIBA

Un Accord de coopération en vue

Visiter Brazzaville est sans conteste un privilège. Mais approcher, en plus, le Musée des Arts du Bassin du Congo est un bonheur. La présence, du Directeur Général du CICIBA, le professeur Antoine Manda Tchebwa, dans les locaux de La Dépêche de Brazza, ce 4 octobre 2018, en fournit une belle illustration. Bascule merveilleuse vers l’univers des arts anciens du terroir bantu.

C’était presqu’irréaliste. Pourtant, dès le premier abord, ici à la Galerie du Bassin du Congo de Brazzaville, on se laisserait volontiers emporter dans l’épaillage du rêve. Difficile de s’épuiser dans un quelconque manque.
On connaît Les Dépêches de Brazza par le professionnalisme de ses journalistes, la qualité de ses publications, la régularité quasi métronomique de ses parutions. Cela lui vaut déjà une grande estime de la profession et du grand public.
De là à imaginer la passion et l’heureuse proximité de cet imposant groupe de presse avec l’univers des arts de l’aire bantu, on perdrait presque au change. Et dire que c’est bien en cet espace muséal que, face au foisonnement dont nous gratifie la créativité des ancêtres, il est donné de stimuler la curiosité des yeux et des sens.
La scénographie du Musée offre toute sa singularité dans un refus absolu de reproduire, pour le plaisir de la mémoire, des solutions plastiques routinières. L’enjeu étant de permettre aux visiteurs de garder les yeux grandement ouverts sur les merveilles du passé dans une perspective didactique, constructive.
Ici, en effet, au contact de tant d’objets rares rehaussé par la noblesse et le génie des Aînés, anoblis par l’estampille ancestrale, on apprend à sentir la mystique et la vitalité de l’art du passé dans la singularité des canons bantu. Toujours hors du temps chronologique.
Art bantu. Art de la savane et de la forêt. Art tellurique. Art animiste. Figuratifs et abstraits. Moteur du destin.

Ici, des objets hier sacrés, aujourd’hui désacralisés : sculpture de bois, en cuivre, en fer ou en laiton, fétiches à clous, statuettes-fétiches et leurs propriétés magico-religieuses, etc. Une esthétique sculptée toujours traversée par la puissance ontologique du créateur anonyme de la tribu. Objets d’apparat et de prestige.
Plus loin, des objets royaux, sceptres, amulettes, bustes de roi ; des objets de l’univers musical (harpes, cithares, arc, grelots, hochets, tambours…) ; des objets destinés aux rites agraires ou régaliens (sièges, haches, lances d’apparat, herminettes… ; des objets de l’espace domestique (récipient en cucurbitacée, marmite, cuillères en bois, meule, molette…). Modélisation de l’architecture royale traditionnelle.

Plus loin encore, des œuvres de peinture, célébrant une plastique votive, sont induites des patines et colorants polychromes d’une intensité dense et profonde, parfois sévère et âpre. Elles renouvellent notre imaginaire sur les grandes figures de la royauté de notre zone culturelle commune. Des Vili au Kongo, des Teke aux Mbochi, des Jaga aux Luba, Mpongwe, Fang, Myène, Kuba ou Cokwe, etc.

Au milieu de cet immense héritage sculptée, la figure de la femme est de toute sérénité et de beauté, maternelle, procréatrice. Elle se projette dans la grâce des lignes de son corps, l’ampleur des formes, la fluidité des mouvements… qui rappellent l’esthétique du corps dans la candeur de son essence bantu.
Plus loin des objets utilitaires : céramique, poterie, instruments de la forge, produits de la vannerie, tissage de raphias, nattes, écorces d’arbres, marmites, quincaillerie métallique, paniers… Une œuvre de raison découlant d’une inventivité endogène.

De la matière végétale (fibres de raphias, herbes séchées et écorces d’arbre) ; entre épannelage, tissage et sculpture dans des masses amorphes, le créateur muntu a, on l’a vu, innové les formes de ses inventions plastiques pour le triomphe de son existence la plus sommaire. A foison, saluons de la belle œuvre artisanale du terroir !
C’est une telle richesse étalé aux yeux du visiteur qui est exposé au Musée du bassin du Congo, et qu’a découvert l’hôte du jour, le professeur Antoine Manda Tchebwa, émerveillé par cette continuité vers le passé, vers un arrière sensible jamais clos. La scénographie, holiste et généreuse, dans un va-et-vient dialectique entre hier et aujourd’hui, prêche une seule vérité : celle d’une temporalité cosmique non figée, portée par les réminiscences de la puissance inventive des Ancêtres bantu, ainsi que le rêve d’une Afrique centrale enluminée par une ontologie glorieuse.
Tout le mérite revient à la haute direction de l’institution, pilotée avec tant de passion et de bonheur par Monsieur Jean-Paul Pigasse, assistée de madame Lydie Pongault (DAF), et du Philosophe-artiste, Maurain Jonathan Mobassi.
Réfutant quelque inclination à une généalogie ethnique forcenée, tout dit l’identité archétypale. Tout indique l’unité culturelle d’Afrique centrale. Prédomine avant tout un art de foi. Un art ancien venu du fond des âges célébrant, sous nos yeux, les beautés mystiques des terroirs bantu en haute verve. Au-delà du contingent, et peut-être de l’éphémère, il y a comme un voyage dans les inédits et les interdits de l’histoire ancienne appelant à une réappropriation des temps et de l’esprit créatif des Aînés.
Emotion. Transfiguration. Félicité !
De cette visite au cœur d’une entreprise de la redécouverte de nous-mêmes, se dégagent des catégories esthétiques du « beau », du « bien » et du « vrai ». Surtout de « l’agréable ». Par-delà la puissance ontologique de ces œuvres, il y a un au-delà actanciel qui, s’ouvrant au cosmos, dépasse les lignes, les volumes, les platines, les patines, la fonctionnalité intrinsèque pour s’étendre à une dimension plus grande : la reconquête d’un imaginaire essentialisant, transfiguratoire, et puissamment revitalisant.
Art authentiquement fondateur de civilisation, rendu visuel et tactile par une exigence vitale capable de frapper la pensée supérieure de l’homme, puisque science d’une métaphysique du beau. Voici que « l’homme extrait son temps passé du passé pour en avoir conscience dans le présent, vivre et agir en toute conscience historique », dixit Obenga.
Une telle opportunité ne pouvait, on s’en doute bien, laisser le CICIBA indifférent. Encore moins inactif. En vue d’apporter sa contribution à la valorisation d’un tel espace d’exposition des trésors du passé bantu, le CICIBA a fait son choix : il consolidera ses rapports avec Les Dépêches de Brazza via un Accord de coopération. A signer très bientôt.

Tel est le sens à donner aux mots si enjoués, consignés dans le Livre d’or de la Galerie par le Directeur Général du CICIBA :
« Le Musée Galerie du Bassin du Congo est un haut lieu de mémoire, de fraternité et d’histoire. Un tel héritage, gardé aux bons soins des Dépêches de Brazza, est une invitation à nous réapproprier notre être intime, notre histoire commune et notre humanité bantu.
Félicitations pour cette initiative merveilleuse.
Merci pour tant de bonheur éprouvé au contact de ces œuvres intemporelles.
Longue vie au Musée. Le CICIBA lui tend la main pour une coopération durable. »

Pr Antoine MANDA TCHEBWA
Directeur Général du CICIBA

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